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Macron et le système politico-militaire : le passé, le déni, la connivence !

D’abord une précision, un truisme en fait, qui devrait aller de soi, mais que des politiciens, et des pseudos historiens oublient systématiquement d’envisager, lorsqu’ils entreprennent de s’attaquer sournoisement à la mémoire d’une autre nation, à son histoire, aux origines de sa formation. 

Il est donc opportun, en les circonstances, de rappeler qu’il n’y a aucune nation au monde qui soit née dans ses frontières actuelles par la seule grâce du Saint Esprit. La configuration territoriale de tous les pays du monde découle de vicissitudes historiques qui peuvent aller jusqu’à la transgression des conformations géographiques naturelles. Peut-être faut-il rappeler à Monsieur Macron que les frontières de la France n’ont pas toujours été ce qu’elles sont aujourd’hui. Elle s’est formée lentement, au gré des secousses de l’histoire, comme tous les autres pays du monde par ailleurs. Et juste pour l’exemple, entre d’autres régions, Nice et les Alpes-Maritimes ne sont devenues françaises qu’en 1860. 

Il n’était donc pas très raisonnable, de la part de Monsieur Macron, ni encore moins amical, venant d’un président d’un Etat où vivent des millions d’Algériens, ou d’origine algérienne, d’avoir ainsi, et avec une telle légèreté, attenté, oui oui, attenté, c’est le verbe qui convient à la circonstance, attenté à la mémoire de tout un peuple. 

Peut-être faut-il rappeler à Monsieur Macron que c’est le régime qui a capté la souveraineté du peuple algérien sur son pays, qui use de cette mémoire comme d’une bien commode rente, dans le même moment où ses parentèles et ses clientèles ont installé leurs pénates en France, en plus de l’argent qu’ils y ont blanchi, et qui provient de la rapine systémique qu’ils perpètrent sur les richesses de l’Algérie. 

Peut-être faut-il rappeler aussi, à Monsieur Macron, que si l’Algérie n’existait pas dans ses frontières actuelles avant l’arrivée des Français, cela a été le cas de tous les pays voisins, dont les frontières ont toujours fluctué selon les bouleversements politiques qui ont secoué la région. 

Peut-être aussi faut-il rappeler à tous ceux-là qui n’en finissent pas de nous rappeler que ce sont les Français qui ont donné son nom à l’Algérie, qu’il serait plus judicieux de dire que ce sont eux qui en ont traduit le nom, qui existait des siècles avant leur arrivée, et qui s’appelait El Djazair. Et qui s’appelle toujours El Djazair. Dzair, pour les intimes.

A partir de l’islamisation du Maghreb, Des dynasties et d’autres, et non pas de véritables Etats nations telles que perçus aujourd’hui, ont eu des frontières qui ont beaucoup bougé, de l’extrême-est, depuis l’actuelle Tunisie, jusqu’à l’extrême-ouest, le Maroc et la Mauritanie. Des Royaumes y ont vu le jour, se sont étendus ou rétrécis, avant de disparaître ou de se transformer. Peut-être faut-il rappeler aussi, qu’hormis les Aghlabides, toutes les dynasties ont été berbères, mais que leur langue officielle a toujours été l’arabe. En ces temps-là, les démons de la discorde et de la détestation n’avaient pas encore été lâchés par le colonialisme, avant d’être réactivés par le système actuel, qui allait se servir des mêmes méthodes colonialistes, après l’indépendance, pour continuer à diviser les Algériens.

Ces précisions historiques devaient être faites.

Mais qu’en-est-il des autres propos de Monsieur Macron. 

Tous les hirakistes algériens, actifs ou potentiels, autrement dit la quasi-totalité des Algériens, si l’on excepte les soutiens du régime, et ses alliés naturels ou conjoncturels, ont bien compris que le président français n’a usé d’une telle vigueur à l’endroit du régime algérien que sur fond électoraliste, en ces temps de pré-campagne présidentielle. Et c’est dire qu’il savait assurément que ses paroles étaient surtout destinées à une certaine frange de l’électorat français, fascinée par le discours Zemourien, et qui a besoin d’être draguée dans le contre sens du poil, pour lui permettre de se hérisser sans complexe, de sortir ses griffes, et de pouvoir enfin expulser, par le vomi, le postillon, l’anathème, et la diarrhée verbale, le peu qui lui restait de pudeur et d’humanisme. Au diable ces grands principes républicains, n’est-ce pas, ces miaulements timorés, ces tralalas de la liberté, ces mi-mi de l’égalité, et ces ni-ni de la fraternité. Circulez, y a rien à voir, charbonnier est maître chez lui, n’est-ce pas ?

Or Monsieur Macron savait forcément que ses propos allaient parvenir aux oreilles des dirigeants algériens, puisque le journal Le Monde avait été convié à assister à l’échange, si on peut appeler ainsi cette véritable opération de com. Il avait donc voulu moduler ses déclarations de façon à faire du deux en un. Ratisser dans les milieux du ressentiment xénophobe, et tout particulièrement algérophobe, et profiter de l’occasion pour envoyer un message offensif aux dirigeants algériens, que dans son infinie ingénuité, il scinde en deux, le président Tebboune et les généraux. J’insiste sur ce qui semble relever de l’ingénuité, parce que malgré les notes et les expertises que Macron reçoit quotidiennement sur le régime algérien, Macron semble être très mal informé, sur la vraie situation algérienne. Tebboune avait réussi à lui faire croire, lors d’une série d’entretiens depuis un hôpital allemand, qu’il était en train de mener une véritable transition démocratique, mais qu’il était entravé par les généraux algériens, hostiles à ses visions d’une nouvelle Algérie, et qui font tout pour saper ses efforts. Tebboune avait voulu faire du Bouteflikisme sans Bouteflika, sauf qu’il n’en a ni la subtilité, ni les moyens. Mais Macron s’est quand même fait rouler dans la farine du vieux roublard de souk hebdomadaire, et malgré les informations dont il dispose, il a fini par se persuader que le président installé par une partie des généraux était réellement dans un affrontement contre les généraux, et qu’il incarnait réellement les aspirations de son peuple. Peuchère !

Mais Macron a été plus que d’envoyer un message aux généraux, et de dire publiquement à Tebboune qu’il n’était plus dupe, sur la nature de ses relations avec ceux qui l’ont fait roi.  Sauf qu’en cherchant à apprivoiser les algérophobes, Macron a osé des propos particulièrement offensants, à l’endroit de la nation algérienne, de son histoire, de sa mémoire, de tout ce qu’elle a subi de l’occupation française. 

Et ce fut, de la part de Monsieur Macron, une lourde erreur d’avoir usé de tant de légèreté à l’endroit d’un peuple très ombrageux, très susceptible, pour tout ce qui relève de son histoire, non parce qu’il doute, mais parce que ses traumas n’ont pas été soldés, que la résilience ne pouvait s’accomplir, avec un tel système politico-militaire, comme il l’a très justement précisé, pour la première fois depuis qu’il drague le même système.

Ce n’est pas « l’Algérie qui s’est construite sur une rente mémorielle, entretenue par le système politico-militaire », mais le même système politico-militaire, une mafiocratie, qui a usé de la mémoire de l’Algérie, pour s’en approprier la légitimité, avec la connivence très affirmée de la France officielle, pour la bien commode raison d’Etat, qui cache des considérations autrement plus chafouines. 

Et comment ne pas lui rappeler, à Monsieur Macron, que les peuples, ou les populations, s’il préfère, qui se trouvaient à l’intérieur de ces frontières qui avaient été en effet tracées par le crayon du colonialisme, ces peuples se sont fondus dans un seul et même creuset, celui de l’une des plus belles et plus acharnées révolutions de l’histoire humaine, pour arracher leur liberté et leur dignité. Et c’est dans un tel creuset que les Algériens ont été à jamais unis, soudés, rassemblés par les liens du sang qui a coulé à flots, par leur résistance, par ce qu’ils ont enduré, 132 années durant, génération après génération. C’est ainsi que le peuple algérien est devenu un bloc, soudé à jamais dans cette nation qui a gagné de haute lutte son droit au respect.

Et Monsieur Macron aura remarqué, que malgré la nuisance mortifère, d’un système mafiocratique, les Algériens restent viscéralement attachés à leur patrie. Vous en avez vu l’illustration, Monsieur Macron, dans l’enthousiasme, quelque peu tonitruant je vous le concède, des supporters de l’équipe algérienne, de ces jeunes issus de l’émigration algérienne, et dont la quasi-totalité est pourtant née en France. C’est dire, n’est-ce pas ? 

Et répondre ainsi à vos propos, Monsieur Macron, ne signifie nullement notre ralliement autour du régime qui nous opprime, mais exprime notre inconditionnel attachement à l’Algérie, à cette même Algérie infestée par ce système qui a fait main basse sur sa souveraineté et ses richesses, et que la France a toujours soutenu contre le peuple algérien. 

Par Djamaleddine Benchenouf

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2 Commentaires

  1. Bravo et chapeau Mr Benchenouf bien répondu, vous êtes à la hauteur l’Algerie a besoin des hommes comme vous, moi personnellement je vous attends tout les soirs sur El Magharibia

    Vive l’Algerie et vive Mezghena et vive le peuple Algérien.

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