Rentrée sociale ! belle expression qui serait énoncée à grands bruits, là où on ne risque pas d’avoir d’ennuis . Un énoncé bien formulé, au goût prononcé pour les choses de l’esprit et qui, exposé, non dans un exposé, mais à la Une de tous les journaux des pays développés. Néanmoins, chez nous, en Algérie, la rentrée sociale n’est qu’une illusion, une épreuve asociale, antisociale dans la conscience collective violemment secouée par la hantise de sa douce morsure qui n’éveillera pas d’échos, ici, et restera lettre morte.
Les augmentations anarchiques des prix devenues froides plaisanteries, une habitude bizarre, une idée fixe qui rentre dans la normalité des choses, et qui tourne presque en monomanie. A vrai dire, entrer dans sa coquille et tirer le rideau, c’est rabaisser le caquet, ou mieux encore, pour faire fort et beau, c’est parler in petto. Et cela se traduit par l’irresponsabilité, l’inconscience, la légèreté ou l’insouciance : choisir à loisir la ou les réponses dans cette suite d’insolentes indifférences. Se taire, se résigner, camper sur une tourbière ou même aller voter, c’est du pareil au même .
Regardez bien ! ou mieux encore utilisez si besoin vos bésicles, lentilles ou lorgnettes pour voir plus clair, ces fameuses lentilles, et toutes les autres légumineuses qui se proposent un prix pour freiner l’appétit, et provoquer courroux et furie. Cela dit, à toutes ces denrées devenues intouchables on leur envoie un regard furtif chargé d’envie et de douceur, de colère et de rancoeur. Encore, faut-il oser parler des viandes, une chair chère, molle ou ferme, blanche ou sanguine, et de réputation désormais déplacée, en ces temps des vaches maigres. Que dire encore ? Les prix flambent, les masques tombent, et le constat d’échec fait l’effet d’une bombe.
Et la misère supplante la pauvreté, et se propage comme une onde de choc. Cette misère est ressentie comme un mauvais sort presque comme une disposition à un mal fatal, elle engendre des besoins pressants, des souffrances, un état de peine qui pâtit. Et pâtir fait frémir : pâtir de la chèreté de la vie, de l’impécuniosité, du chômage, de l’injustice … et bien d’autres maux … longue et accablante serait cette litanie. Pour comble d’infortune, et surcroît de perfidie, les ressources du pays sont devenues propriétés privées : fortunes transférées et biens dilapidés. Le pays se replie sur lui-même, se couvre d’une sombre clarté, fumeuse, nébuleuse, née de cerveaux mal faits caressant l’innommable continuité.
C’est le destin, disent certains, et s’est dit juste par charité, tact, mauvaise foi ou dépit. Mais en vérité, c’est la faillite de tout un système moribond qui est rejeté et maudit, en Algérie.
Par Carus